Mme Micheline Calmy-Rey, ancienne ministre des Affaires étrangères et présidente de la Confédération suisse au Palais de l’Athénée avec le modérateur Patrick Vallelian, directeur général et rédacteur en chef de Sept.ch SA (Photo Le Canton27.ch)
Genève, 22 octobre -Dans le cadre du Salon du livre, qui s’est déroulé à Genève du 21 au 24 octobre 2021, nous avons rencontré au Palais de l’Athénée Mme Micheline Calmy-Rey, ancienne ministre des Affaires étrangères et présidente de la Confédération suisse qui, forte de ses expériences, est venue présenter son dernier ouvrage «Pour une neutralité active. De la Suisse à l’Europe ». Le débat a été ouvert et animé par Patrick Vallelian, directeur général et rédacteur en chef de Sept.ch SA, rapporte le journal suisse en albanais LeCanton27.ch. Cette plateforme médiatique tire son nom du fait qu’elle considère, comme Mme Calmy-Rey, le Kosovo et les Albanais comme le « 27ème canton » Suisse.
Par Nefail MALIQI
Voici en grandes lignes le cœur de son discours qui propose une mise au point éclairante et engagée du concept de neutralité, lequel doit être revisité à la lumière des nouvelles menaces – politiques, économiques, sociales, technologiques, climatiques – qui fragilisent l’équilibre mondial. Micheline Calmy-Rey propose une interprétation contemporaine de la neutralité, active, investie d’une mission de promotion de la paix, éloignée du mythe du repli sur soi.
Calmy-Rey: La Suisse a été le premier pays à parler de l’indépendance du Kosovo au Conseil de sécurité des Nations Unies
«Une forte majorité des Suisses se reconnaissent dans la neutralité de leur pays, elle est un marqueur d’identité. Cependant le droit de la neutralité ou une politique de neutralité ne signifient pas le non-engagement ou l’isolationnisme. Neutralité ne signifie pas indifférence, ce n’est pas rester caché derrière nos montagnes, ne rien dire, ne rien faire. Cela ne signifie pas rester les bras croisés face aux crimes, aux massacres, comme par exemple face à ce qui s’est passé un Kosovo…´ », dit-elle
Question posée par le rédacteur du journal Suisse en Albanais Le Canton27.ch dans le cadre du modèle suisse pour les pays étrangers, quelle est la place du Kosovo dans votre livre? Que pensez-vous de la situation actuelle au Kosovo?
Réponse de Madame Calmy-Rey: «Le cas du Kosovo est très intéressant. La Suisse a été le premier pays à parler de l’indépendance du Kosovo au Conseil de sécurité des Nations Unies. Notre position a été suivie par l’Assemblée générale des Nations Unies, mais par par l’ensemble de la communauté internationale. C’est alors que le Kosovo a proclamé unilatéralement son indépendance. Certains ont dit alors que c’était une violation de la neutralité de la part de la Suisse et qu’elle avait pris parti au niveau international en faveur du Kosovo. S’en est suivi un recours de la Serbie devant la Cour internationale de justice contestant l’indépendance du Kosovo. La Suisse a répondu par la suite à cette même Cour qui a reconnu l’interprétation de la Suisse… »
Pour la prof. Calmy-Rey « Actuellement la situation au Nord du Kosovo est difficile. Il y a donc des tensions permanentes au Nord du Kosovo, comme au sud de la Serbie d’ailleurs, La vallée de Preshevë. A ce stade l’Union Européenne pourrait jouer un rôle puisque la Serbie est candidate à entre dans l’UE… »
Aujourd’hui nous pouvons donner une connotation plus positive de la neutralité, impartiale. Elle ne consiste pas en une prétendue indifférence, mais est bien une prise de décision. Cette neutralité active, par une politique engagée, vise à prévenir et à résoudre les conflits, sans participer aux conflits et aux guerres des autres. Cela demande un dialogue constant. Dialoguer avec même des fractions extrêmes comme le Hamas au Moyen-Orient ou les Farcs en Colombie!
La démocratie suisse prépare à cela. La pratique et l’expérience de la démocratie directe (grâce aux outils populaires que sont l’initiative et le référendum) existent en Suisse depuis plus d’un siècle et demi. À cela les citoyens de ce pays sont éduqués grâce au fait qu’ils sont amenés à se prononcer régulièrement en cours d’année sur des sujets concrets. Ce modèle, que parfois certains pays étrangers nous envient et rêvent de pouvoir installer chez eux, ne peut s’exporter d’un seul coup, il faut s’y préparer.
Cependant en Suisse, cette démocratie directe pourrait être mise en danger aujourd’hui par des mouvements extrêmes qui pourraient l’affaiblir. J’en veux comme exemple la position des antivaxs qui ont affirmé que si la modification de la loi Covid-19, mise en votation le 28 novembre prochain, serait acceptée par le peuple, ils déclareraient la votation comme truquée…comme l’a fait Donald Trump vis-à-vis de l’élection de Joe Biden ».
Mme Micheline Calmy-Rey, ancienne ministre des Affaires étrangères et présidente de la Confédération suisse au Palais de l’Athénée avec le journaliste Nefail Maliqi, du journal suissse en albanais Le Canton27.ch